Quand elle meurt, je n'ai jamais vu une mort aussi mal jouée, j'en ai même ri

J'en parlais déjà en introduction de ma critique sur Les Immortels, précédent film de Tarsem Singh : peu importe la qualité de son œuvre, le réalisateur indien possède, quoi qu'on en dise, une touche artistique sans commune mesure lorsqu'il met en scènes ses histoires. Son style visuel est réellement atypique et se reflète toujours plus dans chacun de ses projets.

Ainsi, dans ce Blanche-Neige (pas celui avec Bella qui lui sortira deux mois plus tard), l'on retrouve un de ses péchés mignons : prodiguer des costumes aussi exubérants qu’époustouflants à ses acteurs, avec une minutie toute particulière leur étant apportée pour parfaire la vision de Tarsem, toujours très symbolique. Dans la lignée des habits, les coiffes sont également du même tenant, plutôt farfelue mais ridiculement peu hors de propos vis-à-vis du visuel présenté. Le doré est proéminent, et cette tendance à saturer les couleurs des tissus ou quelques éléments diverses pour contraster avec une combinaison plus morne alentours reste d'actualité.
Les décors sont d'ailleurs très stylisés, et le château de la Reine laisse tout de suite transparaître un sentiment de grandeur. Toutefois, ils apparaissent souvent trop "vides", tellement épurés qu'ils manquent de vie, de naturel (la forêt et sa neige en coton par exemple). D'ailleurs, l'on pense plus à des scènes de théâtre qu'à un univers crédible par-delà l'écran. C'était pourtant un aspect que Les Immortels parvenait bien mieux à exploiter et utiliser à son profit, pour conserver cette optique de peinture type Renaissance. Dans le cas de Blanche-Neige, ça convainc moins. Sinon, la réalisation est bien amenée et plutôt chouette. L'on retrouve ces travellings de caméra qui oscillent entre trajectoires réelles et numériques dont Tarsem raffole. Prendre un peu de distance sur certaines scènes mouvementées auraient permis de les rendre plus appréciables, mais elles ne sont pas non plus illisibles. Et malgré le soin tout particulier apporté au visuel, il demeure des effets plutôt ratés vers la fin, sur la représentation de la bête ou le vieillissement de la Reine.

Sans non plus envoûter, cette adaptation de Blanche-Neige divertit une bonne partie de sa durée (difficile d'éviter les passages creux) et ne pâtit guère de cette image plus envolée, joviale, alors que le tout Hollywood enchaîne les révisions plus sombres que jamais (et Blanche-Neige et le Chasseur montrera d'ailleurs cette optique du conte des frères Grimm). Peut-être plus en relation avec la version Disney, ce long-métrage ne s'empêche tout de même pas quelques libertés, surtout dans la dernière phase de son développement (même si pas mal de passages prévisibles). À tel point que l'on a du mal à vraiment savoir le parti qu'a décidé de prendre Tarsem Singh, entre hommage appuyé ou parodie gentillette ; le film a-t-il été pensé avec une ironie consciente ou bien un sérieux qui tourne au ridicule ? Avec ce côté parfois très téléfilm, surtout sur les attitudes des personnages et certains plans kitsch, la question se pose régulièrement.

Toutefois, le côté burlesque que je craignais voir dominer l'entièreté du film n'est finalement pas une tare. Il n'est, de toute façon, pas si prononcé que cela, hormis quelques surplus dont on se serait passé, surtout du côté du personnage de la Reine méchante qui finalement n'apparaît pas si venimeuse, mais Julia Roberts s'en sort plutôt bien. Quelques moments prêtent tout de même à sourire, et les nains, des plus attachants, sont la source de bon nombre d'entre eux. Armie Hammer interprète justement, de bout en bout, le prince fou éperdu de la jeune fille croisée dans les bois, tandis que Lily Collins, avec son air malicieux, convainc également en Blanche-Neige, malgré une mise en valeur assez timide.

Côté trame sonore, le compositeur Alan Menken est un habitué du genre (Aladin, Pocahontas, Hercules, La Petite Sirène,....). Sans proposer des thèmes mémorables, il habille sans fausse note chaque scène de ce conte fantastique et accompagne docilement le spectateur dans son voyage. Alan connaît les ficelles du métier et il n'a aucun mal à user la musique à bon escient pour compléter le film. Le clip final est également surprenant, mais un vrai régal, avec ses racines Bollywoodiennes assumées.

Tarsem Singh continue d'enchaîner les genres aussi différents que possible, du thriller psychologique torturé à l'aventure fantastique pleine de poésie, du péplum mythologique héroïque au conte pour enfant comique, et toujours en imposant sa vision unique, qui suffit à donner de l'intérêt à chacune de ses histoires tant cela joue sur le caractère du film. Même si ses derniers films ne sont pas des plus exceptionnels, le réalisateur vaut le coup que l'on garde un œil sur lui, surtout que son prochain méfait portera sur Marco Polo, de quoi rendre encore plus intrigante cette prochaine œuvre biographique.

Oui, je sais. EuropaCorp, Luc Besson, tout ça. Rien de bien aguicheur pour promouvoir un film de science-fiction. Français qui plus est. Certains ont fait l'apologie de ces studios mieux que moi, et il est vrai qu'on y trouve une perle parmi une quinzaine de médiocrités (sinon plus).

Quoiqu'il en soit, le pitch de base de ce Lock Out est des plus banals : sauver la fille du président. Mais cette fois, ça se passe dans l'espace, avec un demi-millier de prisonniers très méchants, et pas beaux du tout. Pour sauver le coup, il y a l'agent Snow, un genre de Jason Bourne avec le caractère de Tony Stark (version cinéma). En gros, ça va tabasser, saigner, exploser, et se foutre de la gueule du monde pendant tout le film. Plutôt chouette non ? Une heure et demie d'action décomplexée.

Trop décomplexée même. Le film se regarde une heure puis s'abandonne. Guy Pearce qui s'infiltre dans la station spatiale et dézingue du lascar à tour de bras avec un humour bête et grinçant, c'est fun jusqu'à ce que les scénaristes essaient de rendre leur intrigue intelligente en glissant des complots et trahisons dans tous les coins. Ça, on s'en fout un peu à vrai dire. Le personnage que campe l'acteur australien est bien plus digne d'intérêt, et la prestation de Pearce pour lui donner vie est un vrai régal. Tout le reste, c'est de la figuration. Maggie Grace et sa rebel attitude se contente d'apporter un visage féminin au centre de cet amas de testostérone. Vincent Regan en meneur de prisonniers calculateur a la bonne gueule pour donner de la crédibilité. La petite surprise vient de la présence de Joseph Gilgun, que l'on connaît plus pour son rôle de Rudy dans la saison 3 de Misfits, qui joue ici un prisonnier psychotique qui aime tuer. Son grain de folie est appréciable.

À part cela, c'est très dynamique. Entre les fusillades, les séquences coups de poing (au sens propre), les piques verbales, et les courses poursuites, il ne reste guère de temps pour s'ennuyer. Et heureusement que le rythme est soutenu car côté réalisation, c'est tout ce qu'il y a de moins inspiré et de plus pompeux. Calqué sur les superproductions américaines à la Michael Bay, l'image dégueule de flares en tous sens qui visent plus à masquer la pauvreté des effets numériques et des matte paintings. Dans les couloirs de la station prison, ça va encore, c'est une fois en dehors que ça tâche. Les scènes spatiales ont un aspect très jeu vidéo dans leur rendu, et les incrustation des personnages sont généralement ratées. Quid de cette poursuite en moto immonde au tout début du film ?

En soi Lock Out est bien fun, surtout grâce à Guy Pearce, et pas prise de tête du tout (mais alors pas du tout). Ça bastonne et c'est marrant. Sauf qu'à force de trop tirer vers l'absurde et de ne pas assumer ses scénarios tous cons, le film devient juste lourd (la dernière demie-heure tout spécialement) et l'intérêt retombe très vite au plus bas. Et puis, je ne sais pas si le plus ridicule c'est le fait d'avoir voulu rendre cette histoire sérieuse, ou juste que les réalisateurs pensaient qu'ils pourraient en faire une suite. Parce que, figurez-vous, qu'à la fin, on ne nous dit pas tout ! Non, mais franchement...