Récapitulatif des films de la semaine. Encore très varié
Les Garçons Et Guillaume, À Table ! : Concurrent direct de La Vie D'Adèle aux Césars, le film de Gallienne traite également de la recherche identitaire sexuelle à sa façon. Idolâtrant sa mère (et les femmes), Guillaume les imite et son entourage est alors convaincu qu'il est homosexuel. Lui-même s'y perd. Si le thème peut être dramatique, le ton reste assez léger et généralement comique. La construction du récit est plutôt originale puisqu'il est presque autobiographique, et adapté d'une pièce de théâtre - tout cela se mélange et Guillaume offre une excellente interprétation, où il se confie à son public. Dans le film, il joue même sa mère de façon très convaincante, et comme il le faisait plus jeune. Tout cela est plein de beaux sentiments, mais on n'échappe malheureusement pas à la comédie française de base, avec plusieurs situations lourdes et très faciles au niveau de l'humour. Il faut également pas moins de 40 minutes pour rentrer totalement dans le film, et la suite n'est pas pour autant toujours excellente.
Ashes And Snow : Pas vraiment un film expérimental, Ashes And Snow est tout de même loin d'être conventionnel. Retraçant le parcours narratif et sensoriel d'une exposition - la plus vue au monde - comprenant photos, textes et petits films, de l'artiste Gregory Colbert, ce film est une successions de longs plans, tous au ralenti. Avec un filtre ocre/doré constant, Gregory filme des danseurs au milieu d'éléphants, baleines et autres animaux. La teinte de la pellicule rappelle tout le temps les terres africaines et asiatiques qui servent de décor sauvage et offrent quelques plans saisissants. C'est beau, poétique, et la musique - minimaliste, bruitiste ou divine - y est envoûtante. Toutefois, il faut s'accrocher puisque l'ensemble apparaît davantage comme une succession de peintures. Très lent, avec une narration minimaliste racontant une histoire d'amour, Ashes And Snow devient parfois terne de son manque de variation visuelle, et les plans ne semble pas toujours avoir de rapport avec le "récit", ce qui rend sa petite heure parfois soporifique.
Guillotines : Extrêmement décevant de la part d'Andrew Lau (Infernal Affairs), Guillotines la joue blockbuster avec ses centaines de figurants, des scènes d'action à grande échelle, et une certaine volonté d'épique, mais se plante totalement. En cherchant à se placer dans un contexte historique, Lau nous sert une histoire des plus improbables, avec ses machinations politiques prévisibles et ses revers d'intrigue tirés par les cheveux, expliqués à grand renfort de flashbacks intempestifs. Pas ailleurs, le film est long et manque cruellement de rythme, en plus d'accuser de sérieux manque de moyens avec une réalisation très irrégulière, des effets spéciaux très pauvres et des chorégraphies mollassonnes sur les scènes d'action, et bien mal montées. C'est une autre culture, mais les acteurs semblent plutôt mauvais hormis Shawn Yue et Huang Xiaoming, et la musique est pompeuse, maladroite et exaspérante. Du gros film chinois sans intérêt.
Maniac : Remake du film des années 80, ce Maniac se révèle plutôt original dans la redite puisque Franck Khalfoun transforme le slasher de base en un film presqu'entièrement à la première personne, vu à travers les yeux du "psychopathe". Il y a une réelle réflexion derrière cette nouvelle tournure qui créé un certain malaise puisqu'on est dans la peau du tueur, et on se prend à espérer qu'il s'en sorte. Très habile et astucieux, on est ici davantage face à un Thriller psychologique où l'instabilité mentale du personnage joué par Elijah Wood crée une atmosphère envoûtante, ponctuée de quelques sections franchement gores (et gratuites). Toutefois, les plans de caméra restent très lisibles et bien calculés pour l'occasion, et il y a quelques maladresses, mais l'idée est très bonne. La bande-son est également excellente, toute en synthés 80s qui contribuent assurément à cette ambiance dérangeante. Un film '"d'horreur" unique en son genre et, pour une fois, plutôt intelligent dans sa construction.
Silent Running : Avec plus de quarante ans au compteur, l'âge commence à vraiment ce voir sur ce classique de la science-fiction. Et c'est aussi ce côté oldschool qui fait son charme. Les effets spéciaux ne sont pas vraiment laids, puisque le réalisateur a quand même bossé sur des grands intemporels comme 2001, Alien, Blade Runner... mais on voit clairement l'aspect maquette et carton-pâte de l'ensemble, bien qu'il ait l'avantage d'avoir beaucoup d'effets pratiques. Dans le côté pauvre, notons les vues spatiales et une mise en scène très sommaire, ainsi qu'une musique disgracieuse qui échoue à souligner la beauté de certains passages. Silent Running souffre de longueurs, un jeu d'acteur très passable, et des situations traitées à la va-vite. Néanmoins, il a quelques bonnes idées, comme ce message d'anticipation écologiste et moraliste qui questionne le fondement de l'être humain. Mais si le concept de départ est sensé, il semble ne pas être exploité au mieux.
Argo : En connaissant un minimum les films de Ben Affleck, on sait de suite où le point d'orgue de tension va être axé, et ça ne loupe pas. Les trente dernières minutes à l'aéroport sont plutôt réussies nous font nous agiter bien nerveusement. Avant cela, le long-métrage prend un peu trop son temps pour rentrer dans le contexte de cette extradition en sol iranien, sans avancer de scènes très pertinentes. On peut tout de même souligner la photo d'époque - années 80 - qui donne l'impression que le long-métrage est daté, contrairement à d'autres films historiques très lisses ; cela ajoute un certain cachet de crédibilité. Il n'y a pas grand chose d'autre à relever, si ce n'est que Cranston fait encore de la figuration depuis Breaking Bad, qu'Affleck reste inexpressif, et qu'on revient encore à ce conflit Amérique/Moyen-Orient mis en exergue pour dramatiser. S'il reste bien mis en scène, il est difficile d'y voir toutes les récompenses face à un Zero Dark Thirty qui était mieux mené dans le genre.
La Clinique De L'Amour : Artus de Penguern a une vision bien à particulière de la comédie (française) et ses œuvres ne sont clairement pas destinées au spectateur lambda adepte des sempiternels mêmes gags potaches. Après un géniallissime Grégoire Moulin Contre L'Humanité, il continue à miser sur un scénario intelligemment construit plutôt que de la simple scène à sketch. Y aller sans connaître le credo du bonhomme, c'est assurément rester coi pendant la projection puisque de Penguern tourne ici en dérision les soap operas du genre Les Feux de L'Amour, avec leur lot de melodrama très fortement marqué au cadrage et à la musique, de revers scénaristiques improbables, de révélations incongrues, de deus ex machina à foison, de dialogues tous plus cuculs les uns que les autres, et d'un ton ridicule global sans queue ni tête. S'il est divertissant et bien mieux pensé que les comédies habituelles, La Clinique De L'Amour n'en est pas moins exubérant, profitant de son ironie pour tout se permettre et se faisant finalement bien trop guignolesque.
Warm Bodies : Quand on voit les réactions outrées devant World War Z, on se dit que le public veut de l'original mais peste dès qu'on touche aux figures "classiques" du cinéma. Warm Bodies c'est un peu ça aussi. Il porte le genre du zombie en dérision, à la façon d'un Shaun Of The Dead, en partie, et le détourne vers un point de vue sociologique du zombie qui n'est pas forcément un monstre, qui n'est pas sans rappeler In The Flesh. On aurait pu craindre un Twilight-like, avec l'amourette humain/infecté, or le film parvient à ne pas tomber dans le niaiseux en gardant un rythme dynamique, de bonnes musiques, des interventions fun, une mise en scène bien gérée, et un scénario qui sait toujours ramener un brin d'ironie. Le plus sympathique est assurément d'avoir ce point de vue introspectif du zombie qui se questionne sur sa condition. Par contre, dès que toute l'espèce commence à dialoguer - ils avaient plus l'air de trisomiques que de zombies - c'est devenu trop facile, et moins intéressant pour la suite du récit, très prévisible.
American Gangster : Ridley Scott se détourne des grandes épopées pour mettre en scène l'histoire du criminel Frank Lucas, qui a sévi dans les années 70. Tout d'abord, on ne peut qu'applaudir la représentation d'époque des différents quartiers américains. Visuellement, avec cette photo vieillotte et une caméra à la main, on a l'impression que le film a été tourné au même moment. Du coup, on a davantage affaire à un film noir, avec une image terne, et parfois une allure de téléfilm. Heureusement que le scénario est solide pour garder l'intérêt. La progression de l'enquête est captivante, tout comme l'évolution des deux personnages principaux. Denzel Washington livre une interprétation remarquable et très nuancée dans les émotions. Russel Crowe est moins mis en avant, mais représente une certaine idéologie. Malgré sa durée de presque 3h (version longue), Scott trouve le moyen de faire quelques raccourcis de narrations et d'ajouter des séquences dispensables. American Gangster reste un film de mafieux et de pourris, inspiré d'une histoire vraie, mais prenant beaucoup de libertés pour le plaisir du cinéma.
Upside Down : Je m'attendais très franchement à pire de la part d'un film qui ne semblait qu'être une amourette niaise entre Adam et Eden (!), avec l'éternelle scission des classes, et le côté SF changement de gravité juste pour faire cool. J'en suis plutôt surpris. Il possède certes un peu de tout ça, mais il a également toute une ambiance et esthétique non négligeables. Malgré cette surabondance de tons bleus et oranges qui donnent parfois des effets baveux et une image moche, il y a d'autres plans tout simplement beaux et poétiques, notamment ces points entre les deux mondes comme les montagnes inversées et les nuages concentriques. L'art du moment est mis en exergue par de très jolies musiques, souvent des morceaux de Sigur Rós ou Syd Matters totalement envoûtants. Malgré un Jim Sturgess très impliqué, et Kirsten Dunst qui au moins est jolie, le scénario n'échappe pas à quelques lourdeurs, facilités, et incohérences par rapport à son contexte expliqué noir sur blanc en début de pellicule. À côté de ça, la fin est trop abrupte pour un film plutôt soigné dans l'ensemble.