Récapitulatif des visionnages de la semaine, toujours très variés
Melancholia : Incursion fascinante dans le cinéma de Lars Von Trier, pour ma part, Melancholia n'aurait pu mieux porter son nom tant une profonde mélancolie habite le long-métrage. Découpé en deux parties bien distinctes, la première suivant une réception d'après-mariage qui tourne au drame sans qu'on ne comprenne forcément tous les comportements et antécédents des personnages, et la seconde un peu plus contemplative abordant la réaction des gens face à un évènement spatial grandiose et fataliste. Kirsten Dunst est splendide et excellente, Charlotte Gainsbourg est brillante également. Avec cette caméra à l'épaule qui bouge un peu trop, des dialogues et une bande-son minimalistes, hormis pour les scènes surréelles appuyées de la grandeur des partitions de Wagner, Melancholia respire le film d'auteur à chaque plan. Artistiquement riche, peuplé de symboliques dans l'esthétique et assez hypnotique entre les intérieurs dorés du château et les espaces naturels extérieurs, le film est beau mais manque de consistance narrative, avec l'impression d'avoir deux parties vraiment indépendantes.
Moonrise Kingdom : Wes Anderson a ce petit truc qui fait qu'il est impossible de décrocher de ses films ; une fois lancé, t'y restes jusqu'au bout. Certainement grâce à son excellente gestion du rythme, ainsi que cette patte artistique exacerbée qui crée des univers colorés extravagants et totalement fascinants. On a l'impression d'être devant un livre pour enfants où la magie se transmet dans les cadrages hypnotiques et des plans brillamment composés. La bande-son garde ce ton enjoué, avec quelques pièces plus grandioses, et possède aussi une certaine excentricité. De par une intrigue riche et entraînante, balançant parfaitement situations cocasses et ton dramatique, un casting de choix que l'on voit ici sous un autre jour, et des dialogues superbes, toujours dans cet esprit décalé si particulier, l’œuvre d'Anderson se montre savoureuse. Centré sur une aventure d'enfants, Moonrise Kingdom exagère parfois un peu et manque de vraiment toucher, mais demeure un long-métrage sensationnel aux choix artistiques singuliers, et s'inscrit parmi ces contes cinématographiques totalement envoûtants.
The Dictator : Sacha Baron Cohen, créateur de personnages satiriques depuis 1998. Des personnages délurés, souvent débiles, reflet d'une société et de ses craintes. Dans ce nouveau film, il se transforme en Général Aladeen, dictateur de la Wadiya, pays fictif pas si différent de ceux du Moyen-Orient. Le ton est bien entendu ironique dès le départ, et la majorité des passages humoristiques passent par les dialogues plutôt que par les gags. Il n'empêche que le film ne vole pas très haut et se repose essentiellement sur des clichés pour en jouer, mais sans jamais approfondir beaucoup plus. Il y a bien quelques réflexions d'humour noir, ou des moments comme le vol en hélicoptère, qui sont bien trouvés, néanmoins l'ensemble reste très puéril, du niveau d'un American Pie, ou d'un Scary Movie. Dans le film, Baron Cohen est destitué de son personnage assez vite, et l'intrigue finit par être répétitive, sans surprise et dans la veine de n'importe quelle autre comédie. Rien de bien folichon au final.
Dans La Maison : De son concept original, intrigant, et parfaitement amené, Dans La Maison assure un démarrage excellent et prenant. Manipulation par les mots, voyeurisme de l'imaginaire, rôle de l'auteur et du spectateur... des thèmes abordés intelligemment à travers cet élève qui rédige ses journées sur papier pour son professeur qui cherche l'écrivain en lui, et veux plier la réalité en travail de fiction, pour ses propres désirs. Très bien mis en scène, et accompagné d'une bande son légère et poétique, le film fonctionne surtout grâce à un Lucchini brillant, et son acolyte adolescent (Ernst Umhauer) qui est une vraie trouvaille tant on peut lire la malice et la mesquinerie dans son regard. Toutefois, l'on sent qu'Ozon s'égare par moments et est prisonnier de cette idée originale qui finit par perdre de son charme et s'autorise quelques situations excessives par rapport à l'ambiance installée. Dans La Maison reste bien mené et une belle métaphore du cinéma, nous faisant imaginer toute une histoire derrière chaque fenêtre.
The Caller : Du genre de petit film d'horreur sans le sou qui a au moins le mérite d'avoir un concept pas trop mauvais : un téléphone qui sonne avec, au bout du fil, une vieille mégère du passé qui ne compte pas lâcher sa nouvelle amie. Le bémol étant que les scénaristes ne devaient pas savoir comment développer tout ça sur plus d'une heure ; ils ont alors rajouté une histoire de divorce et d'ex-mari violent pour avoir un peu plus de scènes de tension, mais sans grand intérêt pour le récit. Sans cela, cette intrigue temporelle à travers le combiné a quelques idées sympathiques, mais également pas mal d'incohérences inhérentes à ces petites productions qui ne veulent pas se casser la tête sur "l'effet papillon", et un finale assez facile alors que le film devenait plus intéressant dans ces dix dernières minutes. La forme n'aide pas non plus à créer une ambiance, puisque très basique et téléfilm, avec des acteurs bon marché et un Ed Quinn qui est le croisement parfait entre Christian Bale et Liev Schreiber, ce qui est fascinant.
The Incident : Dans son format plutôt court (1h25, à peine), The Incident tente au moins d'aller à l'essentiel, après vingt minutes de mise en contexte pour nous présenter ces Rockeurs du dimanche, employés comme cuistots dans un hôpital psychiatrique. Il suffit d'une nuit de tempête pour bloquer tout ce beau monde au milieu des malades mentaux, et dans le noir, rien de très rassurant tant des personnes aussi peu saines d'esprit et imprévisibles peuvent être effrayantes. Réalisé par le clippeur Alexandre Courtes, The Incident demeure assez classique en terme de survival, avec des esprits dérangés pas si dérangeants, mais quand même quelques séquences trash à faire grincer les dents. Par ailleurs, le cadre est bien trouvé et assure une ambiance frissonnante bien mise en scène. On peut également noter ce finale assez intelligent, même s'il est possible de le deviner assez tôt au vu du thème du film. The Incident ne propose pas de grands moments de flippe, mais s'avère être un film d'horreur honnête et bien monté.
The Cosmonaut : Produit grâce au crowd funding, The Cosmonaut a plus du film d'étude que du gros délire d'un Iron Sky. Dans une optique de film d'auteur, avec des plans artistiques et un développement lent, on y suit un cosmonaute qui revient sur une Terre dépeuplée d'humains, entrecoupé de flashbacks sur son histoire passée et cette mission spatiale dans l'URSS des années 70. J'aurais préféré que l’œuvre soit majoritairement portée sur l'errance de ce cosmonaute à son retour, qui propose quelques concepts saisissants, plutôt que la backstory de trio amoureux peu intéressante, insérée dans un montage déconstruit. On y retrouve un peu du Solaris de Tarkovsky, et du Love d'Eubank, avec une mise en scène soignée mais aussi quelques plans très pauvres en captation HD. La bande-son est aussi belle, mais les ambitions du réalisateurs ne sont pas toutes atteintes et le parallèle avec la conquête spatiale apparaît finalement anecdotique dans un film qui manque d'indices pour être totalement évocateur.
Les Âmes Vagabondes : C'est tellement niais ! Andrew Niccol est décidément tombé bien bas. D'un côté, ce n'est pas très étonnant venant de Stephenie Meyer, même si on reste quand même un cran au-dessus de Twilight. Déjà que ses amourettes sont chiantes et prévisibles à l'écran, mais alors qu'elle s'attaque à la science fiction seulement pour la forme, sans rien y connaître... Les incohérences apparaissent dès le départ, et ne font que se multiplier à travers ce traitement utopique/dystopique banal. C'est cette intrigue fade d'une société uniformisée, avec une personne qui va tout changer par la force de son amour, peu importe les questions de logique scénaristique qui restent en suspens. Il y a bien quelques scènes qui sortent du lot, notamment grâce à la bande-son d'Antonio Pinto, assez onirique par endroit. Dommage que ce soit pour un tel film qui, cinématographiquement, n'a aucune personnalité, avec des prestations quelconques, et une fin qui crie indéniablement à la suite, quel autre intérêt sinon ?
Space Dive : Space Dive est le docu-reportage sur Felix Baumgartner dans son aventure pour sauter des frontières de la stratosphère. En 1h30, le film retrace cette mission financée par Red Bull depuis 2009, et tous les déboires qui ont mis à rude épreuves les convictions, porte-monnaies et deadlines. Finalement, le 14 octobre, on est tous rivé devant le stream de Youtube pour voir cet exploit de l'homme qui sera le premier à atteindre une vitesse supersonique en chute libre. Mais, là encore, on ne voit pas tout des derniers incidents de parcours. Dans une succession de difficultés qui n'a rien à envier à la malchance de Bullock dans Gravity, le reportage donne l'impression d'être pas mal dramatisé. On peut également regretter un montage trop typé émission MTV, quand on sait que Red Bull peut produire de superbes docus comme The Art Of Flight. C'est d'autant plus dommage que la BO de Pemberton est adéquate à la grandeur du moment, tout en étant aérienne. Toutefois, les images d'archives de Kittinger sont toutes aussi impressionnantes, même en ayant plus de 50 ans.
50/50 : Il y a de ces moments où un film, à tout de point de vue classique, parvient à nous mettre la larme à l’œil. Peut-être à cause de la fatigue aussi, mais 50/50 est le troisième à réussir à me toucher de la sorte. En une vingtaine d'années, ce n'est pas trop mal. C'est justement de vie qu'il est question dans cette histoire de cancer qui altère totalement la vision que l'on finit par avoir du monde, pour sombrer dans le pessimisme. Sans toutefois faire du larmoyant facile, Jonathan Levine préfère adopter un ton comique, tout en laissant la place à la portée plus dramatique. Bien sûr, l'intrigue est évidente, mais superbement dosée entre l'humour (plus ou moins graveleux, à cause de Rogen), et les moments d'émotion forts, que l'on doit à une musique légère et poignante, et un excellent casting. Anna Kendrick est trop craquante, et Gordon-Levitt délivre une prestation assurément puissante plus son cancer croît. Derrière le ton comique américain de base de 50/50, Levine réussit à entraîner son spectateur dans un récit plus profond et attachant.
[REC]³ Génesis : Vingt minutes à peine, c'est le temps que met ce troisième volet de [REC] pour faire son introduction, et afficher son titre. C'est aussi le temps qu'il tient dans le sérieux avant de dégringoler totalement dans le film de genre guignolesque. Après ce prologue, exit le found footage, [REC] redevient filmé normalement. Et comme si la scission n'était pas suffisante, le réalisateur a décidé de la jouer comédie, car il est difficile de penser que tous les passages ridicules d'armures, de répliques invraisemblables, le choix des musiques, et cet apport religieux risible, ne soient pas volontaires. Mais quel intérêt d'infliger cela à une franchise qui n'était déjà plus en super forme ? Autant faire un film indépendant, si c'est juste pour attirer le spectateur grâce au nom. Surtout que les infectés n'ont pas grand chose à voir avec les deux premiers films. Pour vous dire, j'ai eu l'impression de regarder une version espagnole et zombifiée de notre tout aussi oubliable Les Dents De La Nuit. Au moins, ce [REC]³ Génesis a des effets gores réussis, et c'est tout.
Dead Leaves : Dead Leaves doit être un des films (50 min) d'animation les plus délurés et étranges que j'ai pu voir. Dans un style graphique bien particulier, anguleux et 2D, qui fait penser à un comic book animé avec des couleurs uniformes bien criardes, des onomatopées apparentes, et des scènes de grand délire, Dead Leaves assume un ton assez immature dès le départ, virant souvent au scato-porno et accueillant, parmi ses personnages difformes, un mec avec une foreuse en guise de pénis. Déjà là, Hiroyuki Imaishi montrait son délire pour l'instrument de vrille culte à la base de Gurren Lagann, et l'animateur Takeshi Koike laissait libre cours aux idées survitaminées qui reviendraient dans Redline. Sur un rythme effréné, coloré et épileptique, le moyen-métrage se cache derrière une intrigue des plus secondaires (mais bien amusante) pour pouvoir enchaîner des séquences de science-fiction exubérantes avec un dynamisme infatigable. Il n'y a aucun répit dans ce joyeux cocktail totalement aliéné, un peu lourd parfois, mais sacrément fun et très vite vu.
Dark Star : Avouons-le, les débuts de Carpenter, ce n'était pas franchement ça. Alors, je veux bien que Dark Star date de 1974, qu'on y trouve les prémisses d'Alien dans le scénar d'O'Bannon, que la fin adapte directement du Bradbury dans ce qu'il a fait de plus profond spatialement, et qu'il s'agissait à la base d'un film d'étudiants, mais sortir un truc aussi fauché, aux effets spéciaux absolument navrants, quand il y a déjà Solaris et 2001 qui ont révolutionné le genre, ce n'est pas possible. Surtout au vu du ridicule du long-métrage, même voulu. Un chat perché avec un alien de baudruche pendant 20min - soit un quart du film - qui n'apporte rien, des bombes qui discutent, des combinaisons grotesques, et un réalisme par dessus la jambe, ça ne fait en rien une bonne parodie. Malgré les bruitages d'ambiance plutôt réussis, on est dans le vaisseau le plus impraticable de toute la science-fiction, avec un équipage chiant, et des cadrages très serrés (pas de budget) qui n'aident aucunement à trouver fascinant ce film sans intrigue, et sans enjeux.
9 Mois Ferme : 9 Mois Ferme est à classer dans la catégorie de ces comédies françaises qui démarrent plutôt bien et semblent faire dans l'original jusqu'à ce que, pour pouvoir satisfaire un scénario farfelu, le film ait la fâcheuse manie de se pourvoir de situations totalement improbables et, donc, peu crédibles. Bien évidemment, pour nous garder dans la folie de l'intrigue, il y a le personnage de Dupontel, très drôle dans son interprétation, même s'il finit par être excessif, à l'instar de celui de Kiberlain. Et c'est sans compter le caméo totalement gratuit de Dujardin. Dans l'ensemble, l'humour n'est pas d'un niveau très recherché, que ce soit du simple gag humoristique ou des répliques pas toujours finaudes. Notons quelques bonnes trouvailles de mise en scène visuelle qui font parfois penser à Jeunet et apportent un peu de fraîcheur. À une vingtaine de minutes de la fin, on se prend à espérer que le film sort enfin de la comédie balisée qui a servi à monter toutes les BA, sauf qu'il retombe rapidement dans la comédie sympathique mais pas très originale.